Emil Nolde – Grand Palais 16 octobre
Ce contemporain germanique de Matisse ne concevait pas, à l’instar de ce dernier, la peinture comme une sorte de « fauteuil confortable et reposant », mais plutôt comme un coup de poing ! Dès la première salle de l’exposition, servie par une scénographie d’une rare élégance, la violence de ses juxtapositions de primaires-jaunes contre rouges-désarçonne le spectateur et laisse au bord de la rupture les rétines formées en Italie…
Emil Nolde (1867-1956), la quarantaine venue, se fait soudain happer par l’express Van Gogh. Il est monté dans ce train rapide, plantant là les paysans attablés autour d’une bouteille de schnaps peints dans un style passablement réaliste. Soudain, il dope les couleurs et fait se lever la tempête au-dessus de ses « Moissons » et de ses « Rondes endiablées ». « La femme qui fume » risque même de mettre le feu au tableau tout entier. Paul Cassirer, le grand marchand berlinois qui a toujours soutenu les avant-gardes, accroche l’un des tableaux de Nolde près des toilettes, à l’occasion d’une exposition de groupe…
Cette façon colossalement pétaradante d’envisager la couleur, Nolde ne l’abandonne pas quand il passe à la peinture religieuse. A ses « Christ » jaunes évoquant de très loin les audaces du premier Gauguin, ses scènes bibliques aux formes déchirées et outrancières, on peut préférer ses admirables gravures sur bois, enlevées d’une main plus sûre et plus sobre. L’évocation de Gauguin n’est pas inutile puisque c’est aussi dans le sillage du grand peintre français que Nolde se glisse quand, un an avant la Grande Guerre, il part à la découverte des verts paradis océaniques. Un long périple le conduit vers la Nouvelle-Guinée, colonie allemande depuis 1899, et les îles Carolines. L’artiste en rapporte des centaines d’aquarelles, de toiles et de dessins ainsi qu’une solide détestation des moeurs coloniales.
Mais aucun paysage exotique ne saurait égaler ceux de sa Frise chérie, où il s’installe dès que possible dans son repaire de Seebüll, à quelques encablures de la frontière danoise. Installé au sommet d’une butte, comme les fermes au toit de chaume des alentours, il domine son plat pays et peut se consacrer à ce qu’il aime le plus, la célébration de la campagne. Du début à la fin de sa carrière, ces paysages adorés donnent naissance à quelques-uns de ses meilleurs tableaux, dans lesquels perce parfois le souvenir des grands romantiques du début du XIXe siècle. Comme ces derniers, Nolde est habité par une conception quasi religieuse du paysage. Du reste, il lui arrive de laisser une de ses oeuvres à l’extérieur, le temps pour la neige d’ajouter la touche finale.
L’arrivée au pouvoir des nazis en 1933 ne le trouble guère au départ, Nolde adhérant même spontanément à certains de leurs thèmes. Toutefois, Hitler pas plus que Goebbels n’apprécient sa peinture, considérée comme appartenant à l’« art dégénéré ». Sa grande « Crucifixion » échappe de peu à la destruction, un certain nombre de ses toiles sont brûlées et, finalement, à partir de 1941, il n’a plus le droit de peindre. Nolde doit se cacher pour réaliser de minuscules aquarelles sur des papiers de récupération. oeuvres modestes auxquelles il confie son amour intact de la nature.
Bonne exposition,
Saint-Sulpice
Galeries nationales du Grand Palais - Galeries nationales du Grand Palais – 3 avenue du Général Eisenhower – 75008 Paris – métro Champs-Élysées-Clémenceau (lignes 1 & 13). Bus n°s 28, 32, 42, 49, 72, 73, 80, 83 & 93 - ouvert tous les jours sauf le mardi de 10h à 22h (20h le jeudi) – Tarifs: adultes 12 euros, tarif réduit 8 euros, gratuit pour les moins de 13 ans – Jusqu’au 19 janvier 2009
lucaerne 16 octobre
Fascinant !!! J’adore…
saintsulpice 16 octobre
J’en étais sûr!!!!!
A+
Saint-Madamus-Soleilus
de peyre martine 2 août
trés beau!! lumineuse peinture trés émouvante..
saintsulpice 2 août
Bonsoir Martine,
En effet, les oeuvres d’Emil Nolde sont saisissantes, touchantes!
Cordialement
Saint-Sulpice